Emmanuel Ruben

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Né en 1980, agrégé de géographie, Emmanuel Ruben est l’auteur d’une dizaine de livres ­­­­­– romans, récit, essais ­­­­­– parmi lesquels La Ligne des glaces (2014, sélection du Prix Goncourt), et Sur la route du Danube (2019, prix Nicolas Bouvier, Prix Amerigo Vespucci, Grand prix sport et littérature). Il dirige la Maison Julien Gracq et vit sur les bords de la Loire.  

le livre

Il était une fois. Comme dans tous les grands romans, c’est-à-dire qui sollicitent notre part d’enfance, cela commence par  : «  Il y avait autrefois dans la salle à manger des grands-parents, un sabre de modèle inconnu, que je n’ai jamais manié, jamais soupesé, pas même caressé. » Le revoilà, Samuel Vidouble, le narrateur, coincé dans une maison, poussiéreuse mais encore hantée par les fantômes d’une famille provinciale, calviniste, « sans histoires, sans qualités, sans titres de gloire  », dans « un cul-de-sac de la France et de l’Europe », au bout d’une ligne de train improbable et nocturne, le revoilà, ce Samuel Vidouble, professeur d’histoire désabusé, et amateur de cartes de géographie, qui décide d’enquêter sur ce souvenir d’enfance, guidé par tante Esther, libraire à la retraite : «  Où était-il passé ce sabre  ? Et si je l’avais rêvé  ? »

Ce n’est pas tant le sabre à la lame courbée, fêlée, couleur de Sienne, que les époques qu’il a pu traverser, les lignées d’hommes, de guerres, de morts, qui impressionnaient autrefois le jeune Samuel, lui qui appartient à la dernière génération ayant connu celles qui firent la guerre. Et puis à quel ancêtre revenait-il, ce sabre  ? Qui était l’héroïque, ou au contraire, l’imposteur sans foi ni loi  : VVRL, Victor Vidouble Rex Livorum  ? Victor Vidouble roi des Lives, qui aurait jadis régné sur un archipel de la Baltique  ? Un descendant d’huguenot confiné dans son pays de marais, d’étangs et de tourbières  ? Un nobliau du XVIIIe siècle, amoureux des cartes de géographie, lui aussi, et qui mise sur elle pour l’arracher à sa province reculée  ? Le baron Victor Vidouble de Saint-Pesant, mythe familial ou légende du grand dehors que les oncles-vétérans réinventent à tour de rôle, à la veillée  ? Vaut-il mieux se vouer au réel, souvent  décevant, que suivre l’aile de l’imaginaire, avec ses histoires d’îles perdues ou inventées  ? À moins qu’une carte au trésor familiale nous permette de situer le lieu et l’époque  d’où viendrait le fameux sabre ? 
Dans la lignée des autres livres d’Emmanuel Ruben, qui ont l’imaginaire et l’ailleurs au cœur de leur force, mais d’une puissance romanesque remarquable, d’une invention géographique drolatique, Sabre est le livre de la maturité. Un vrai roman picaresque qui tient des Aventures du Baron de Münchhausen autant que du Baron perché d’Italo Calvino. C’est un jeu de pistes vertigineux qui nous fait remonter le fil du temps jusqu’aux guerres napoléoniennes, et nous invite à un voyage baroque à la poursuite de chimères qui disent notre vérité.

la presse

« Sabre fait du pilotage as vu dans l’arbre généalogique, du cabotage dans les bibliothèques, des traversée au long cours de l’océan de l’imagination. Et de belles chevauchées en surf sur les déferlantes du langage. Le roi des Lives ne serait-il pas l’envers du Livre des rois de l’écriture ? Qui suit immédiatement le Livre de Samuel. Pas de hasard dans l’ordre mis en place par Emmanuel Ruben dont on a pu éprouver la rigueur dans Jérusalem terrestre ou La Ligne des glaces. Simplement une manière de donner à l’invention de quoi nous emporter plus loin. » Alain Nicolas, L’Humanité.